Le « micmac » de la TVA en EHPAD

L’assujettissement d’un EHPAD fait souvent l’objet de débat notamment pour le secteur public qui souhaiterait parfois y être soumis. La question de l’application de la TVA refait donc surface de manière régulière.

De quelle manière les EHPAD sont-ils assujettis à la TVA ?

La tarification en EHPAD distingue selon trois tarifs différents : le tarif hébergement, le tarif dépendance, et le tarif soin. L’application de la TVA varie pour ces trois tarifs et en fonction de la nature de l’établissement concerné.

Ainsi, s’il s’agit d’un EHPAD privé à but lucratif :

- Le tarif soins est exonéré de la TVA (Article 261, 4, 1° ter du CGI) ; - Le tarif de hébergement est soumis à un taux de TVA réduit ; - Le tarif dépendance est soumis à un taux de TVA réduit.

L’établissement peut récupérer la TVA sur les dépenses d’investissement et de fonctionnement en matière de dépendance et d'ébergement.

Le contentieux fiscal sur l’application de la TVA est particulièrement abondant. Deux arrêts récents ont permis de préciser les choses.

Tout d’abord, l’arrêt de la CJUE du 27 mars 2014, SARL Le Rayon d’Or, C-151/13, est venu préciser le droit à déduction de la TVA pour les EHPAD privés. Une SARL gérante d’un EHPAD estimait que les sommes reçues au titre du forfait de soins ne relevaient pas du champ d’application de la TVA et qu’elles ne devaient donc pas s’imputer sur le droit à déduction de la TVA.

L’EHPAD estimait que le forfait soins ne pouvait pas être mis en relation avec les soins effectivement réalisés dans l’établissement. Le forfait de soins ne serait donc pas la contrepartie de prestations à titre onéreux.

La CJUE n’a pas suivi la SARL sur ce point et affirme que la somme perçue au titre du forfait soins est bien la contrepartie des prestations de soins réalisées au sein de l’établissement et relève donc du champ d’application de la TVA. Il en résulte à ce titre une exonération de TVA qui doit être intégrée dans le calcul du dénominateur du droit à déduction de la TVA de l’établissement.

La situation pour les EHPAD publics est moins complexe dans l’ensemble puisqu’ils ne sont pas soumis à la TVA ou ne peuvent la récupérer.

Néanmoins, la question de l’assujettissement des EHPAD publics à la TVA ressurgie de manière récurrente. Les questions parlementaires demandant des précisions sur l’application de la TVA aux EHPAD publics sont nombreuses. Un amendement au PFLSS de 2015 demandant la rédaction d’un rapport sur la fiscalité applicable aux EHPAD publics avait d’ailleurs été déposé par un député et adopté par l’Assemblée Nationale en octobre 2014. Toutefois, le sénat a demandé la suppression de cet amendement et de l’article 53 Bis afin de ne pas retarder la prise de décision alors même que des travaux sur la tarification en EHPAD ont été lancés.

Pourquoi les EHPAD publics souhaitent-ils se voir appliquer la TVA ?

Certains EHPAD publics sont de droit soumis à la TVA en vertu des règles de la concurrence. Toutefois, d’autres EHPAD publics souhaitent être soumis à la TVA, notamment en cas d’investissement à venir.

Nombreux sont les cabinets de conseils qui préconisent aux EHPAD publics de choisir l’assujettissement à la TVA. Cet assujettissement leur permettrait de réaliser des bénéfices important et de réaliser des investissements. Il faut ici préconiser la prudence vis-à-vis de ces allégations qui semblent très souvent exagérées. En effet, si l’assujettissement à la TVA pour un EHPAD public peut avoir un avantage, les inconvénients sont nombreux :

- Risque d’exclusion d’un groupement de coopération : l’assujettissement à la TVA d’un établissement du groupement présente le risque de voir l’ensemble du groupement assujetti à la TVA. Les groupements seront donc peu enclins à garder ou à faire entrer ce genre d’établissement ; - Perte du bénéfice du taux réduit de TVA pour les opérations d’investissements (dispositif de livraison à soi-même d’immeuble (article 257-7° du CGI) ; - Impact éventuel sur le financement public apporté aux établissements.

La prise en compte de ses risques est indispensable pour prendre une décision éclairée en matière de TVA. La prise de conseils auprès de la DGFIP est par ailleurs hautement recommandée avant de choisir l’assujettissement à la TVA.