Atteinte à la présomption d’innocence par l’affichage d’une décision non définitive

(1ère civ, 10 avril 2013 n°11-28.406)

Le respect de la présomption d’innocence est un des principes fondamentaux du droit français dont l’atteinte est sanctionnée tant pénalement sur le fondement de l’article 35 ter de la loi du 29 juillet 1881 que civilement au regard de l’article 9-1 du Code Civil.

Si les atteintes à la présomption d’innocence par voie de presse semblent les plus fréquentes, ce principe s’applique également en cas d’affichage d’une décision de justice, comme l’a rappelé la 1ère chambre civile de la Cour de Cassation dans un arrêt du 10 avril 2013.

Un médecin avait affiché dans sa salle d’attente des extraits du jugement condamnant son ex-associé pour abus de confiance, cet affichage étant accompagné d’une mention précisant que cette condamnation était la raison de la séparation des deux associés.

La Cour d’Appel de Paris avait condamné ce médecin à procéder au retrait du jugement ainsi affiché au motif qu’il s’agissait d’une version expurgée qui ne faisait mention ni des arguments développés par le prévenu pour sa relaxe, ni du fait que cette décision avait été frappée d’appel et n’était donc pas définitive.

Le médecin a formé un pourvoi en cassation sur le fondement d’une violation de l’article 9-1 du code civil, arguant du caractère public des décisions de justice et invoquant l’immunité relative au compte rendu des débats judiciaires.

La Haute Juridiction n’a toutefois pas fait droit à cette argumentation et a rejeté le pourvoi en relevant que « l’affichage d’une décision de justice ne peut s’assimiler à l’immunité propre dont bénéficie celui qui se livre au compte rendu de débats judicaires » et surtout que « l’atteinte portée à la présomption d’innocence est réalisée chaque fois qu’avant sa condamnation irrévocable, une personne est publiquement présentée comme nécessairement coupables des faits pénalement répréhensibles pour lesquels elle est poursuivie ».

En d’autres termes, seule une décision de justice devenue définitive est susceptible de faire disparaître la présomption d’innocence.

La Cour adopte là une position très classique et conforme à sa jurisprudence en la matière, une décision identique ayant déjà été rendue (civ 1ère. 12 décembre 1998).