Irrecevabilité de l’action en diminution de loyer en l’absence de tentative d’accord amiable

Le locataire d’un bien destiné à l’habitation dont la surface réelle est inférieure à celle mentionnée dans le contrat de bail n’est pas dépourvu d’action. Depuis la loi ALUR du 24 mars 2014, ce dernier dispose en effet de la faculté d’introduire une action judiciaire en diminution de loyer lorsqu’il constate un écart de surface habitable supérieur à un vingtième de celle prévue au contrat (article 3-1 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989).

Dans un arrêt publié au Bulletin rendu le 20 avril 2023 (Civ. 3ème, 20 avr. 2023, FS-B, n°22-15.529), la Cour de cassation précise néanmoins que pour exercer valablement l’action et obtenir une diminution de loyer proportionnelle à la différence de surface constatée, le preneur à bail doit, au préalable, avoir adressé au bailleur une demande amiable restée vaine ou demeurée sans réponse.

En l’espèce, le propriétaire d’un logement donné à bail a décidé de vendre son bien. Afin de mettre ses locataires en mesure d’exercer leur droit de préemption, ce dernier leur a fait délivrer un congé pour vendre. Estimant que l’acte signifié ne répondait pas au formalisme spécifique imposé par le législateur, les locataires ont assigné leur bailleur en nullité du congé et ont, dans le même temps, formulé une demande en diminution du loyer compte tenu d’un écart entre la surface habitable mentionnée dans le contrat de bail et celle mesurée par eux.

Dans un arrêt rendu le 10 février 2022, la Cour d’appel d’Aix-en-Provence a déclaré irrecevable la demande tendant à obtenir une diminution de loyer, au motif que celle-ci n’avait fait l’objet d’aucune demande amiable auprès du bailleur préalablement à l’introduction de l’instance.

Les demandeurs au pourvoi reprochaient aux juges du fond d’avoir violé l’article 3-1 de la loi du 6 juillet 1989, lequel ne subordonnerait selon eux pas la recevabilité de l’action en diminution du loyer à une tentative de solution amiable entre les parties.

Ne partageant pas l’argumentation développée par les locataires, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi. Selon elle, la cour d’appel a exactement déduit que « faute d’avoir, préalablement à la saisine du juge, adressé au bailleur une demande amiable restée sans réponse, les locataires étaient irrecevables à agir en diminution du loyer ».

Par cette décision, la haute juridiction vient préciser les modalités d’exercice de l’action en diminution du loyer offerte au locataire lésé en favorisant la voie de l’amiable dans le règlement des différends. Cette jurisprudence s’inscrit ainsi dans le fil des réformes récentes dont l’un des objectifs principaux est de développer la culture du règlement amiable des conflits.

Santina MAGNIER