La fixation conventionnelle du loyer librement intervenue entre les parties emporte renonciation à la procédure de révision judiciaire du loyer

Cass. Civ. 3e, 15 févr. 2018, FS-P+B+I, n° 17-11.866 : la fixation conventionnelle du loyer librement intervenue entre les parties emporte renonciation à la procédure de révision judiciaire du loyer et constitue une modification notable des obligations respectives des parties intervenue en cours de bail dans des conditions étrangères à la loi, justifiant, à elle seule, le déplafonnement.

Une SCI a concédé à une société deux baux commerciaux portant sur des locaux contigus. Les parties ont, en cours de bail et jusqu’à sa date d’expiration, décidé de mettre fin à une procédure de révision du loyer en réajustant le prix du contrat à un certain montant, différent de la valeur locative. Le bailleur a demandé la fixation à la valeur locative des loyers du bail renouvelé. Sa demande a été accueillie par la Cour d’appel de Paris dans deux arrêts. Le preneur les a attaqués au motif que la fixation consensuelle du loyer, différente de la valeur locative, en raison de la conclusion d’un avenant de révision du loyer destiné à mettre fin à une procédure de révision judiciaire du loyer, ne constitue pas une modification notable des obligations des parties justifiant le déplafonnement du loyer. Les juges du fond ne confirment pas ce raisonnement. Ils relèvent que la modification conventionnelle du loyer dans des conditions étrangères tant à la loi qu’au bail initial s’analyse en une modification notable des obligations des parties justifiant à elle seule le déplafonnement du loyer. Les avenants du 7 mars 2014 constituent une telle modification conventionnelle, la fixation librement intervenue entre les parties ayant eu pour objectif déclaré de matérialiser la renonciation par les parties à une procédure de révision judiciaire du loyer. Dès lors, le loyer renouvelé doit être fixé à la valeur locative. La Cour de cassation valide ce raisonnement : « la fixation conventionnelle du loyer librement intervenue entre les parties emporte renonciation à la procédure de révision judiciaire du loyer et constitue une modification notable des obligations respectives des parties intervenue en cours de bail dans des conditions étrangères à la loi et justifie, à elle seule, le déplafonnement ». Ainsi, dès lors que les parties au cours du bail expiré se sont accordées sur un nouveau loyer, en dehors de la procédure légale de révision, le déplafonnement est acquis. Cette position n’est pas nouvelle, la Cour de cassation ayant d’ores été déjà considéré que la « modification conventionnelle du loyer dans des conditions étrangères tant à la loi qu'au bail initial s'analyse en une modification notable des obligations des parties justifiant à elle seule le déplafonnement du loyer » (Cass. 3e civ., 4 avr. 2001, n° 99-18.899). La solution aurait probablement été différente si la révision du loyer avait été opérée dans les conditions de la loi, conformément à la procédure légale. En effet, la Cour d’appel de Paris a rejeté une demande de déplafonnement fondée sur une modification des obligations respectives des parties au motif que cette modification (la révision du loyer) ressortait d'une disposition légale et n'avait pas été opérée de façon amiable (CA PARIS, 15 fév. 2012, jurisData n° 2012-003437).