Incompétence de la CIVI pour les accidents de la circulation dans l'Union Européenne

Lorsqu’un individu subit un dommage et qu’il rencontre des difficultés dans l’indemnisation de son préjudice, divers fonds de garantie existent afin de lui permettre d’obtenir une réparation.

Parmi eux, le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO) vient en aide aux victimes d’accidents de la circulation et le Fonds de garantie des victimes d’actes de terrorisme et d’autres infractions (FGTI) couvre les dommages résultant d’une infraction pénale.

En cas d’accident de la circulation situé en France, le FGTI ne pouvait pas intervenir, la loi de Badinter étant exclue de son champ d’intervention. Toutefois, jusque-là, les victimes d'accidents de la circulation à l'étranger en saisissant la CIVI, évitaient de se voir appliquer un droit étranger au bénéfice de la loi française, obtenant ainsi une réparation intégrale par le Fonds de Garantie des victimes d'actes de Terrorisme et d'autres Infractions (FGTI).

La Haute Juridiction semble avoir opéré un revirement dans le cadre de l’affaire étudiée. Une femme de nationalité Française a été victime d’un accident de la circulation au Portugal, impliquant un véhicule conduit par un ressortissant Portugais et assuré au Portugal.

Décédée des suites de ses blessures, les proches de la victime ont saisi la Commission d’Indemnisation des Victimes d’Infractions (CIVI) en vue d’obtenir l’indemnisation de leurs préjudices, conformément à l’article 706-3 du Code de procédure pénale, imposant que la victime soit de nationalité française ou que les faits aient été commis sur le territoire national.

Or, dans le cadre de cette instance, la Cour d'Appel de DOUAI, par un arrêt du 15 novembre 2018, a déclaré irrecevable la requête en indemnisation au motif que l'indemnisation relevait du Fonds de Garantie des Assurances Obligatoires de Dommages (FGAO), et que celui-ci était exclu du champ de compétence de la CIVI. Par un arrêt en date du 24 septembre 2020, la Cour de Cassation vient confirmer la position de la Cour d'Appel en indiquant : “ Les dommages susceptibles d'être indemnisés par le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (le FGAO) en application des articles L.421-1 et L.424-1 à L.424-7 du code des assurances, sont exclus de la compétence de la commission d'indemnisation des victimes d'infractions telle qu'elle résulte de l'article 706-3 du code de procédure pénale, peu important que le FGAO intervienne subsidiairement, en présence d'un assureur du responsable susceptible d'indemniser la victime”.

“Après avoir constaté que l'accident de la circulation dont a été victime M…R… s'était produit au Portugal, Etat partie à l'Union européenne, et avait impliqué un véhicule conduit par un ressortissant portugais et assuré au Portugal, la cour d'appel a exactement retenu que cet accident relevait de la compétence du FGAO, désigné comme organisme d'indemnisation par l'article L.421-1 du code des assurances, peu important la vocation subsidiaire de ce fonds en présence d'un assureur du responsable susceptible d'indemniser la victime ce qui excluait la compétence de la CIVI telle quelle résulte de l'article 706-3 du code de procédure pénale.” Ce revirement effectué par la Cour de cassation est particulièrement défavorable aux victimes d’un accident survenu à l’étranger.

Contrairement au FGTI, le FGAO applique la législation nationale de l'Etat sur le territoire duquel s'est produit l'accident, conformément à l’article L421-11 du Code des assurances. Or, bien souvent, la législation étrangère est moins protectrice que le droit français en termes d’indemnisation des victimes.

A ce jour, cette position n’apparait que pour les pays membres de l’Union Européenne. Il ne reste qu’à espérer que cela ne soit pas étendu.