Contentieux des vices cachés : Exercice successif d’une action rédhibitoire et d’une action estimatoire par l’acquéreur

Dans un arrêt rendu le 18 janvier 2023 publié au Bulletin (Civ. 1ère, 18 janvier 2023, n°19-10.111), la Cour de cassation est venue apporter quelques précisions concernant l’exercice du recours dont dispose l’acquéreur d’un bien sur le fondement de la garantie légale des vices cachés.

En l’espèce, en mars 2008, un particulier a acquis un véhicule d’occasion de la marque Porsche auprès d’un tiers avant de l’échanger avec une tierce personne en novembre de la même année.

Plusieurs mois après la transaction, la personne nouvellement titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule a découvert que celui-ci avait été gravement accidenté avant l’échange et que le montant des réparations à apporter au véhicule était supérieur à sa valeur avant l’accident. Il a donc assigné son vendeur en résolution de l’échange.

Le vendeur intermédiaire a, à son tour, assigné son propre vendeur sur le fondement de la garantie des vices cachés afin qu’il le relève et le garantisse de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre.

Par jugement en date du 28 juillet 2014, la juridiction de première instance saisie du litige a prononcé la résolution de l’échange, condamné le vendeur intermédiaire à verser à l’acquéreur la somme de 27 900 euros et condamné le vendeur originaire à garantir le vendeur intermédiaire de sa condamnation. Le tribunal a, en outre, rejeté la demande en garantie des vices cachés formée par le vendeur intermédiaire à l’encontre du vendeur originaire.

Souhaitant obtenir la condamnation de son propre vendeur en réduction du prix de vente du véhicule sur le fondement de la garantie des vices cachés, le vendeur intermédiaire a alors interjeté appel de la décision de première instance.

Dans un arrêt rendu le 6 novembre 2018 sur renvoi après cassation, la cour d’appel de Caen a fait droit à la demande de condamnation formulée par le vendeur intermédiaire et a ainsi condamné le vendeur originaire à lui verser la somme de 21 799 euros à titre de restitution d’une partie du prix de vente du véhicule.

Faisant grief à l’arrêt de le condamner à restituer une partie du prix de vente du véhicule, le vendeur originaire s’est pourvu en cassation. Il considère, en effet, que la demande en réduction de prix formulée à hauteur d’appel sur le fondement de l’action estimatoire est irrecevable dès lors qu’il s’agit, selon lui, d’une prétention nouvelle au sens de l’article 564 du code de procédure civile et que cette demande était, en tout état de cause, prescrite.

Ne partageant pas l’argumentation développée par le demandeur au pourvoi, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi. Selon elle, outre le fait que l’action en réduction de prix formulée en cause d’appel sur le fondement de l’action estimatoire ne soit pas prescrite, elle ne constitue nullement une demande nouvelle et est donc pleinement recevable dès lors qu’il s’agit, pour le vendeur intermédiaire, d’exercer un même droit tendant aux mêmes fins, à savoir engager la responsabilité du vendeur originaire en raison des défauts cachés de la chose vendue.

Cette décision vient garantir une plus grande protection à l’égard des acquéreurs lésés dès lors que ces derniers peuvent désormais engager successivement l’action rédhibitoire et l’action estimatoire sans craindre de voir leur demande jugée irrecevable.

Santina MAGNIER