Révocation d’un gérant de SARL

A disposé d'un délai suffisant pour faire valoir ses observations le gérant de SARL qui a reçu sa lettre de convocation à l'assemblée générale devant statuer sur sa révocation 11 jours avant cette assemblée. CA Versailles 19-1-2016 n°14/00470

L’article L. 223-25 du code de commerce précise que le gérant peut être révoqué par décision des associés selon les règles applicables aux décisions prises en assemblées générales ordinaires ou à une majorité plus forte si les statuts le prévoient.

Le gérant peut aussi être révocable par les tribunaux, à la demande de tout associé, pour cause légitime

Contrairement aux modalités de révocation des dirigeants d’autres formes sociales (notamment administrateurs et Président du conseil d’administration d’une SA), la révocation du gérant nécessite un juste motif ou une cause légitime (qui sont 2 notions assimilables sans distinction). A défaut de juste motif, le gérant peut se voir allouer des dommages et intérêts au titre du préjudice subi.

Outre l’existence d’un juste motif, ce sont les circonstances entourant la révocation qui sont pris en compte : la révocation ne doit pas revêtir un caractère brusque et vexatoire.

En effet, les dirigeants ont le droit au respect de leurs droits de la défense et ne doivent faire l’objet d’une révocation simplement guidée par une intention de nuire.

C’est pourquoi la jurisprudence a développé des mécanismes de protection fondés sur le respect du principe du contradictoire : tout dirigeant faisant l’objet d’une demande de révocation doit avoir suffisamment de temps pour préparer sa défense.

L’arrêt de la cour d’appel de Versailles illustre parfaitement la manière dont est appréhendée cette notion par les magistrats.

Dans l’arrêt présenté les faits étaient les suivants :

Le fondateur et associé majoritaire d'une SARL cède la totalité de ses parts à une société faisant partie d'un groupe, le dirigeant de cette société devenant à cette occasion cogérant de la SARL. Cinq mois plus tard, le gérant fondateur, désormais non associé, est révoqué de son mandat social.

Le gérant révoqué faisait valoir que sa révocation était intervenue de façon brusque et vexatoire et selon lequel le principe du contradictoire n’avait pas été respecté.

La cour d’appel de Versailles a écarté l’argument évoqué au motif que :

- il avait bien reçu une lettre de convocation envoyée 16 jours avant la tenue de l’assemblée générale devant statuer sur sa révocation, à laquelle étaient joints un rapport de la gérance détaillant les reproches qui lui étaient faits concernant sa mésentente avec l’autre cogérant, ainsi que le texte des résolutions et il était spécifiquement indiqué que l'objet de la convocation à l'assemblée générale était sa révocation à effet immédiat ; - il avait pu présenter ses observations oralement pendant l’assemblée générale en lisant une lettre dans laquelle il contestait sur six pages les griefs allégués à son encontre et il importait peu que cette lettre n’ait pas été jointe au procès-verbal de l’assemblée générale ; - si sa révocation avait été d'application immédiate lors de l'assemblée générale, c’était en raison de ses motifs (mésentente entre les deux cogérants), seule une décision à effet immédiat pouvant permettre le fonctionnement pérenne de la société, et car l’ancien gérant lui-même souhaitait quitter ses fonctions ; - il ne justifiait pas du caractère vexatoire des conditions dans lesquelles il avait dû remettre les clés (selon lui, le jour même de sa révocation), les parties étant en désaccord sur cette question et aucun témoignage extérieur ne venant étayer ses dires.