GHT : une CHT bis ?

Le Groupement hospitalier de territoire (GHT) est le nouveau vaisseau amiral créé par le gouvernement afin de réaliser une véritable coopération hospitalière efficace et dynamique. Intégré dans le projet de loi de santé de Madame la Ministre Marisol Touraine, le GHT vise à « ancrer l’hôpital dans son territoire » et à « renforcer le dispositif de coopération hospitalière ». Toutefois, ce navire amiral semble déjà avoir du plomb dans l’aile tant les critiques et les interrogations sur son mode de fonctionnement sont nombreuses.

Cet outil est destiné à remplacer les Communautés Hospitalières de Territoire (CHT) créées par la loi HPST du 21 juillet 2009 qui ont-elles aussi souffert les critiques des professionnels de santé. Trop lourde, trop complexe à mettre en œuvre et pour des résultats insuffisants. Le GHT devra donc être capable de corriger ces travers tout en restant efficace.

Pour ce faire, le projet de loi envisage plusieurs innovations destinées à faire évoluer la coopération hospitalière.

L’adhésion au GHT sera obligatoire pour tous les établissements publics de santé d’ici le 1er janvier 2016. Il s’agit là d’un calendrier très ambitieux qui apparait difficilement tenable, la loi n’étant encore qu’au stade du projet. Selon le député Jean Leonetti, instaurer une telle obligation d’adhésion aux établissements de santé est indispensable pour permettre à « notre système hospitalier de se recomposer rapidement et de passer outre les inévitables réticences locales ». C’est donc à fin de redynamiser et de renforcer la coopération hospitalière que l’adhésion aux GHT est rendue obligatoire. Il existera des dérogations fondées sur la spécificité de l’établissement lui permettant ainsi de ne pas adhérer à ce groupement. Toutefois, pour ceux qui refuseraient d’y adhérer, ils se verraient privés de dotations de financement de l’aide à la contractualisation. Cela aurait nécessairement un impact sur le fonctionnement des établissements.

Le projet de loi prévoit également d’ouvrir la coopération aux établissements et services médico-sociaux publics. Les établissements privés de santé pourront également intégrer le groupement en tant que partenaire. L’objectif est donc clair : il faut ouvrir la coopération afin de simplifier et d’optimiser le parcours de soin du patient. Toutefois, rien ne précise les avantages et inconvénients d’un tel partenariat pour les établissements médico-sociaux et privés. Au regard des différences de fonctionnements de toutes ces entités, l’unification sous un même groupement semble peu réalisable. Pourtant, les expériences réussies de coopération entre ces différents types d’établissements prouvent qu’une collaboration est possible, voir indispensable pour assurer une stratégie médicale commune.

Le renforcement de la coopération entre établissement suppose de diminuer les coûts liés à l’exploitation des établissements. C’est pourquoi, le groupement devra charger un établissement de remplir les fonctions supports pour tout le GHT. Ce dernier devra gérer le système d’information hospitalier et le département de l’information médicale unique pour l’ensemble du groupement, la politique d’achats, la coordination de la formation. Ainsi, la coopération « forcée » pourrait se traduire par une réduction des frais fixes de fonctionnement et permettent d’économiser notamment en mutualisant les services et en globalisant les achats des établissements au niveau du groupe.

Toutefois cela suppose une entente et une organisation parfaite de tous les membres du GHT. Une telle concertation entre les établissements du groupe apparait toutefois compromise lorsqu’aucune gouvernance n’est prévue par le projet de loi. En effet, il est laissé aux établissements le soin d’organiser le fonctionnement du groupement. De plus, s’il est précisé que les GHT n’ont pas la personnalité morale, le projet de loi n’indique pas quelle sera la place des membres du GHT. En effet, si l’article L 6132-1 –I révèle bien que le GHT ne bénéficiera pas de la personnalité morale, cela interroge sur la nature de cette entité juridique.

Est-ce une autre forme de coopération conventionnelle telle que le prévoyait la CHT ou une forme « sui generis » qui s’imposerait aux établissements ?

Les inquiétudes qui entourent le projet des GHT sont nombreuses, notamment au regard du délai très court qui est imposé par le projet de loi.