Présentation du projet de loi bioéthique en Conseil des ministres

La loi bioéthique du 6 août 2004 comportant une clause de révision générale tous les 5 ans la ministre de la Santé Roselyne Bachelot a présenté en Conseil des ministres le 20 octobre 2010, le projet de loi de bioéthique. L’adoption de ce texte est d’autant plus urgente que la dérogation à l'interdiction de procéder à des recherches sur l'embryon humain posée par la loi de 2004, expire le 6 février 2011.

Ce projet de loi découle d'un important travail préparatoire et d'un grand nombre de travaux d'évaluation, notamment ceux qui se sont déroulés lors des Etats généraux de la bioéthique organisés en 2009. Ils ont montré “l'adhésion des Français aux principes qui fondent les lois de bioéthique”, à savoir : le respect de la dignité humaine et le refus de toute forme de marchandisation et d'exploitation biologique du corps humain.

Bien que ces principes n'ont pas lieu d'évoluer, le texte ne constitue pas une simple mise à jour du droit actuel puisqu’il “introduit des dispositions nouvelles”, notamment le don croisé d'organes, une pratique encadrée depuis des années aux Etats-Unis, en Corée du Sud et au Japon. En Europe, elle est également permise en Italie, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni.

Le don croisé est celui où une personne (A) fait don d'un organe à un malade (B) avec qui il est compatible et qu'il ne connaît pas, car souhaitant donner son organe à un proche malade (A1) il n'a pu le faire faute de compatibilité. En échange, le malade (A1) recevra un organe d'un proche (B1) de la personne malade (B).

Cette technique a pour objet de permettre un don croisé entre deux couples de donneur-receveur, lorsque le don n'est pas possible au sein de chaque couple en raison d'une incompatibilité de groupes sanguins ou pour des motifs immunologiques. Le prélèvement sera opéré de manière simultanée.

Aussi, se conformant à la proposition n°64 du rapport de la mission d'information de l'Assemblée nationale sur la révision de la loi bioéthique de 2004, l'Etat va autoriser le don croisé d'organe en vue de permettre la réalisation de 100 à 200 greffes de rein supplémentaires par an.

Le don croisé d'organes ayant fait l'objet d'un consentement préalable, exprès, libre et éclairé de chaque membre des deux couples de donneur-receveur sera donc autorisé étant précisé que la procédure envisagée respectera “toutes les garanties éthiques” et répondra aux exigences de sécurité des greffes, telles qu'elles sont prévues entre donneurs vivants. Par ailleurs, le texte définit les modalités et les critères permettant d'autoriser les techniques d'assistance médicale à la procréation (AMP) et d'encadrer leur amélioration.

Depuis 1994, les lois de bioéthique ont prévu qu'elles devaient être révisées tous les 5 ans. Cependant, il apparaît opportun que cette particularité ne soit plus retenue dans la loi de bioéthique 2010 afin que la liste des procédés AMP soit évolutive.

A titre d'exemple, la congélation ovocytaire ultra rapide (ou vitrification) serait autorisée.

Egalement, dans un souci d'égalité avec les couples mariés, les couples liés par un pacs seront désormais éligibles dès la conclusion de ce pacte à l'assistance médicale à la procréation (AMP).

Le texte ouvre, en outre, une possibilité d'accès à l'identité du donneur pour les personnes issues d'un don de gamètes, afin de permettre “une meilleure prise en compte de l'intérêt de l'enfant” et de responsabiliser le don, sans imposer au donneur de révéler son identité.

Il convient de précisé que la réforme ne s'appliquera qu'aux dons futurs, et nécessitera le consentement du donneur au moment où les personnes issues de ce don en feront la demande. Pour les dons passés, il faudra une initiative spontanée du donneur, déclarant qu'il est prêt à révéler son identité si cela est souhaité.

D’autres mesures sont prévues. Notamment, la pratique de l'échographie prénatale sera encadrée pour une meilleure information des femmes enceintes sur les objectifs et les limites de l'échographie. Enfin, les critères de dérogation au principe général de l'interdiction de la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires sont affinés de manière à mieux traduire la réalité des travaux de recherche. Pourront être autorisées : les recherches “susceptibles de permettre des progrès médicaux majeurs”, et non plus des “progrès thérapeutiques majeurs”, ce qui permettra d'inclure les recherches en matière de diagnostic et de prévention.