Participation aux études préalables et candidature à un marché public

Le principe de la liberté d’accès à la commande publique est un des principes fondamentaux du droit des marchés publics. La Cour de Justice de l’Union Européenne s’est effectivement prononcée en ce sens dans un arrêt du 3 mars 2005 (CJCE, 3 mars 2005, aff. C-21/03, Fabricom SA c/ Belgique). Dans cet arrêt, la CJUE était saisie d’une question préjudicielle portant sur la conventionalité d’une disposition législative belge qui interdisait aux sociétés ayant réalisées des études pour des travaux publics, de candidater au même marché public de travaux.

La Cour juge alors que : « La directive 89/665 et, plus particulièrement, ses articles 2, paragraphe 1, sous a), et 5, ainsi que la directive 92/13 et, plus particulièrement, ses articles 1er et 2, s'opposent à ce que l'entité adjudicatrice puisse refuser, jusqu'à la fin de la procédure d'examen des offres, que participe à la procédure, ou remette une offre, l'entreprise liée à toute personne qui a été chargée de la recherche, de l'expérimentation, de l'étude ou du développement de travaux, fournitures ou services ».

Une entreprise qui participe à un marché d’étude préalable est donc recevable à candidater ultérieurement pour obtenir le marché public. Cette obligation s’impose tant au législateur qu’aux pouvoirs adjudicateurs qui ne peuvent pas exclure d’office une entreprise au seul motif qu’elle a participé à l’élaboration du cahier des charges ou à des études de faisabilité approfondies ayant précédé la passation du marché.

Le Conseil d’Etat avait déjà affirmé, dans un arrêt de 1998, qu’il relève de l’appréciation souveraine des juges du fonds de déterminer si un candidat ayant participé à un précédent marché a pu bénéficier d’informations susceptibles de l’avantager par rapport à ses concurrents (Conseil d'Etat, 7 /10 SSR, du 29 juillet 1998, n°177952). Une telle position avait été notamment confirmée par une réponse ministerielle du 6 mars 2000 (Réponse ministérielle à question écrite n° 35464 (M. Seux), (JOAN Q du 6 mars 2000, p. 1451). Il est donc clairement possible pour un prestataire de participer à la fois à un marché d’étude préalable et de candidater à l’appel d’offre pour ce même marché. Ni le pouvoir adjudicateur, ni les candidats évincés ne pourront agir sur ce fondement pour obtenir l’annulation du marché.

Il résulte de ce principe fondamental qu’une société qui participe en tant qu’assistante de maitrise d’ouvrage dans le cadre de l’élaboration, du phasage et de l’étude préalable d’un marché public peut également candidater à ce marché en tant que prestataire.

Au regard de la jurisprudence administrative et européenne, une telle participation n’est pas problématique sous réserve que certaines conditions soient remplies. Cette participation est soumise à la condition que le pouvoir adjudicateur n’ait pas inclus de clause dans le CCAP du marché d’étude, interdisant la présentation du titulaire de ce marché et que, ce titulaire n’ait pas été placé dans une position plus favorable que les autres candidats.

S’il est en principe prohibé de refuser la candidature du titulaire d’un marché public d’étude à un appel d’offre pour ce même marché, le pouvoir adjudicateur peut en revanche prévoir une clause dans le Cahier des Clauses Administratives Particulières interdisant au candidat de se présenter. Dans ce cas, l’interdiction de candidater au marché public a été contractuellement acceptée par le prestataire ayant réalisé l’étude préalable. Il ne pourra donc plus arguer du fait de la violation du libre accès à la commande publique puisqu’il aura contractuellement admis une telle mesure.

Il faut également que la personne qui candidate aux deux marchés ne se trouvent pas favoriser dans sa position du fait notamment des informations qu’il aurait pu obtenir dans le cadre de l’étude préalable.

En effet, la personne ayant participé à ces travaux préparatoires peut se trouver favorisée pour formuler son offre en raison des informations qu'elle a, en effectuant lesdits travaux préparatoires, pu obtenir au sujet du marché public en cause. Cependant, cette différence de traitement ne peut avoir pour conséquence d'interdire, en toutes circonstances, à la personne ayant effectué certains travaux préparatoires, de participer à une procédure d'attribution du marché public. Une telle interdiction aurait, en effet, un caractère disproportionné.

Il est donc indispensable que les informations dont dispose la personne ayant réalisée l’étude préalable soient communiquées à l’ensemble des autres candidats pour qu’il n’y ait pas un avantage dans la procédure.

C'est au candidat qu'il appartient de démontrer qu'il ne se trouve pas placé dans une situation de nature à rompre l'égalité entre les candidats. Dans les faits, il ne sera pas toujours aisé pour le candidat d'apporter la preuve que sa participation en amont du marché ne l'a pas avantagé par rapport aux autres candidats. Il s’agit d’une démonstration qui peut cependant ne pas être évidente.

Il existe un principe fondamental de libre accès à la commande publique qui empêche le pouvoir adjudicateur d’automatiquement refuser la participation du titulaire d’un ancien marché.

La société qui été titulaire d’un marché d’étude préalable peut donc candidater à un marché de maitrise d’œuvre, ou à un marché public de travaux. Il lui reviendra néanmoins de démontrer qu’elle ne dispose pas d’un avantage qui l’a placerait dans une situation de nature à rompre l’égalité entre les candidats. Pour ce faire, il faut notamment que l’ensemble des informations qui ont été portées à sa connaissance lors de la réalisation de l’étude préalable soient portées à la connaissance de l’ensemble des autres candidats. Il faudra également s’assurer qu’il n’existe pas de clause dans le CCAP du marché d’étude l’empêchant de candidater au même marché.