Contrefaçon sur internet : compétence et loi françaises

1./ La compétence des juridictions françaises : l’accessibilité du site internet

A titre liminaire, il convient de rappeler que la contrefaçon relevant de la matière délictuelle, la juridiction compétente au sens de l’article 46 du code de procédure civile est celle du lieu du défendeur ou du ressort dans lequel le dommage a été subi.

Toutefois, et compte tenu de la portée internationale d’un site internet, l’application de cette règle a dû progressivement être précisée par la jurisprudence.

C’est dans ce cadre que la première chambre civile de la Cour de cassation a rendu quatre arrêts le 22 janvier 2014 relatifs à la détermination de la compétence des juridictions françaises en cas de commission d’actes de contrefaçon sur internet.

En effet, ces quatre litiges soulevaient la question de savoir si les juridictions françaises pouvaient être compétentes pour juger des actes de contrefaçon commis à travers un site internet exploité dans un pays étranger mais accessible en France.

Par un attendu très explicite et commun à toutes ces décisions, la Cour de cassation a indiqué que «l’accessibilité dans le ressort de la juridiction saisie, par voie hertzienne ou par le réseau internet, de tout ou partie du documentaire incriminé, est de nature à justifier la compétence de cette juridiction, prise comme celle du lieu de la matérialisation du dommage allégué ».

Ainsi, dès que le site est accessible en France, la sanction de la contrefaçon du droit d’auteur sur internet peut relever de la compétence des juridictions françaises.

En rendant deux de ses arrêts au visa de l’article 3 du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000, la Cour de cassation a précisé l’interprétation de celui-ci au regard de l’accessibilité du site internet dans le ressort de la juridiction saisie.

En outre, les juges français avaient déjà eu l’occasion d’affirmer leur compétence « lorsqu'une infraction aux droits de propriété intellectuelle ou un acte de concurrence déloyale a été commis par une diffusion sur le réseau internet » au motif que « le fait dommageable se produit en tous lieux où les informations litigieuses ont été mises à la disposition des utilisateurs éventuels du site » (TGI Paris 3 mai 2000 D.2000 jurisp.p. 640).

2./ L’application de la loi française : la destination du site internet

Si ces quatre arrêts s’attachent à la compétence du juge français en cas de contrefaçon de droit d’auteur sur internet, n’oublions pas de rappeler que la loi applicable à ces actes est celle, selon le règlement Rome II, du pays pour lequel la protection est revendiquée et selon l’article 5.2 de la convention de Berne, du pays où la sanction est demandée.

A ce titre et malgré une absence d’unicité de la jurisprudence sur ce point, la Cour de cassation et suivant un faisceau d’indices (textes en français, destinés au public français…), a indiqué que la loi française est applicable dès lors qu’il existe un « lien de rattachement substantiel avec la France » (Cass 1ère civ. 12 juillet 2012 n° 11-15.165).

Ainsi, la loi française trouve son application dès lors que le site internet est orienté vers le public français c'est-à-dire qu’il s’adresse à celui-ci notamment par l’emploi de la langue française, par la possibilité d’un paiement en euros, ou même la livraison des produits en France.