Un commentaire de l’arrêt CJUE, 22 septembre 2011, Interflora contre M&S

La Cour de justice de l’Union Européenne (CJUE) dans une décision pragmatique autorise les sociétés à user de la marque d’un concurrent à des fins publicitaires, en tant que mot-clé de référencement sur Google Adword.

La société M&S effectue notamment de la vente et livraison de fleurs. Dans le cadre de son référencement publicitaire sur Google Adword, elle choisit comme mot clé le nom d’un de ses concurrents notoirement connu pour son activité dans le même domaine : INTERFLORA ainsi que des déclinaisons de ce mot.

La société Interflora titulaire de la marque Interflora assigne aussitôt la société M&S en contrefaçon. Le juge britannique demande alors l’avis du juge européen.

Dans le prolongement de sa jurisprudence, la Cour relève que dans le cas d’utilisation d’un signe identique pour les mêmes produits ou services, le titulaire de la marque est habilité à en interdire l’usage seulement si celui-ci est susceptible de porter atteinte à l’une des fonctions de la marque. La Cour rappelle à cet égard ses décisions précédentes :

1/ Il y a atteinte à la fonction d’indication d’origine lorsque l’annonce ne permet pas ou permet seulement difficilement à l’internaute normalement informé et raisonnablement attentif de savoir si les produits ou les services visés par l’annonce proviennent du titulaire de la marque ou d’une entreprise économiquement liée à celui-ci ou, au contraire, d’un tiers.

2/ La Cour écarte toute atteinte à la fonction de publicité de la marque.

En revanche la Cour relève pour la première fois une atteinte à la fonction d’investissement de la marque. Cette fonction est entendue par la Cour comme l’usage de la marque afin d’acquérir ou conserver une clientèle.

Ainsi il y a atteinte à la fonction d’investissement de la marque dans les cas où « l’usage par un tiers, tel qu’un concurrent du titulaire de la marque, d’un signe identique à cette marque pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels celle-ci est enregistrée gêne de manière substantielle l’emploi, par ledit titulaire, de sa marque pour acquérir ou conserver une réputation susceptible d’attirer et de fidéliser des consommateurs ou met en péril le maintien de celle-ci.

On retiendra donc surtout que si cet usage à des fins de publicité n’oblige le titulaire qu’à adapter ses efforts, en vue d’acquérir une clientèle, dans le cadre d’une concurrence loyale, sans tromper le consommateur sur l’origine du produit notamment, alors l’atteinte n’est pas constituée.

Enfin le titulaire d’une marque renommée, dans les cas de ternissement de la marque renommée ou de dilution par dénaturation de cette dernière en un terme générique, peut en faire interdire un tel usage. Une société est donc autorisée à faire un usage de la marque d’un concurrent à des fins de publicité dès lors que son annonce n’attente pas aux principales fonctions, notamment l’indication d’origine, de la marque, ne ternit pas la marque ni ne la dilue et n’offre pas une simple imitation des produits du titulaire de la marque