L’étendue de l’interdiction de la contrefaçon de la marque communautaire

Le règlement n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire crée un régime pour les titres communautaires. Il prévoit dans ses articles 97 et 98 que les Etats membres doivent définir sur leurs territoires les tribunaux compétents pour juger des actions notamment en contrefaçon des marques communautaires. Ces tribunaux peuvent constater la contrefaçon et ordonner à ce titre des mesures d’interdiction et coercitives afin de faire cesser cet acte. C’est à l’occasion d’une affaire opposant la société Chronopost SA à la société DHL Express France SAS que la Cour de Justice de l’Union Européenne a été saisie d’une question préjudicielle. En effet, la Cour d’appel de Paris a confirmé dans un arrêt en date du 9 novembre 2007 la condamnation de la société DHL Express France pour contrefaçon de la marque française et a ordonné l’interdiction sous astreinte des signes contrefaits. La Cour d’appel n’a pas étendu l’interdiction sous astreinte à l’ensemble du territoire de l’Union : « le prononcé d’une mesure d’interdiction sous astreinte à l’échelle communautaire suppose que le tribunal des marques communautaires ait communication des lois nationales prévoyant une mesure comparable. Que, dès lors, l’interdiction prononcée ne saurait s’étendre à l’ensemble de l’espace communautaire ».

Un pourvoi en cassation a été formé par la société DHL et un recours incident concernant la limitation au territoire français de l’interdiction par la société Chronopost l’a accompagné. La Cour de cassation a saisi la CJUE d’une question préjudicielle afin de savoir si l’interdiction de poursuivre les actes de contrefaçon ou de menace de contrefaçon d’une marque communautaire, prononcée par un tribunal des marques communautaires, a effet de plein droit sur l’ensemble du territoire de l’Union.

La grande chambre de la CJUE a répondu à cette question dans un arrêt du 12 avril 2011. Au point 44, elle affirme que « l’interdiction de poursuivre les actes de contrefaçon ou de menace de contrefaçon prononcée par un tribunal des marques communautaires compétent doit donc, en principe, s’étendre à tout le territoire de l’Union ».

Par conséquent, la mesure coercitive, l’astreinte ici, prononcée par le tribunal des marques communautaires en vertu de son droit national, selon l’article 98 §1, produit un effet dans tous les Etats membres de l’Union. Ces mesures doivent avoir le même effet sur tous les territoires que sur le territoire de l’Etat membre qui les a prononcées. Les Etats membres sont tenus de faire exécuter cette interdiction. Si un Etat membre ne connaît pas cette mesure coercitive, le tribunal qui est dans l’obligation de la faire exécuter doit prendre des mesures nationales qui ont des effets analogues à l’interdiction prononcée.