Précisions sur la « compensation équitable » de la copie privée

L'arrêt CJUE 21 octobre 2010, C-467/08, Padawan répond à une question posée à la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) concernant le litige entre une société de gestion collective espagnole et une société qui commercialise des CD-R, CD-RW, DVD-R et des appareils MP3, la première réclamant à la seconde le paiement de la redevance pour copie privée (art. 25 du décret royal législatif 1/1996, 12 avr. 1996). Avant de trancher, l'Audiencia provincial de Barcelona a posé plusieurs questions préjudicielles à la CJUE, avec pour objectif de savoir quel est l'équilibre à respecter dans le système de compensation équitable découlant de l'exception de copie privée.

Interprétant l'article 5, paragraphe 2, sous b), de la directive CE n° 2001/29 du 22 mai 2001 sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information selon lequel les États membres peuvent prévoir des exceptions ou limitations au droit de reproduction « lorsqu'il s'agit de reproductions effectuées sur tout support par une personne physique pour un usage privé et à des fins non directement ou indirectement commerciales, à condition que les titulaires des droits reçoivent une compensation équitable qui prend en compte l'application ou la non-application des mesures techniques visées à l'article 6 aux œuvres ou objets concernés ».

L Cour juge que « l'application, sans distinction de la redevance pour copie privée, notamment à l'égard des équipements, d'appareils ainsi que de supports de reproduction numérique non mis à la disposition d'utilisateurs privés et manifestement réservés à des usages autres que la réalisation de copies privées, n'est pas conforme à la directive CE n° 2001/29 ».

La lecture de cette partie de l'arrêt du 21 octobre 2010, conduit à penser que sont exclus les équipements, appareils ainsi que les supports de reproduction numérique mis à la disposition d'utilisateurs non privés. Sont, par exemple, visés les professionnels qui utilisent des DVD pour faire des copies d'examens médicaux. En Espagne, tous les supports sont taxés quel que soit le client final.

En France, l'article L. 311-8 du code de la propriété intellectuelle prévoit certaines exclusions pour les entreprises de communication audiovisuelle, les producteurs, les éditeurs d'œuvres publiées sur des supports numériques ou encore les personnes morales qui utilisent les supports d'enregistrement à des fins d'aide aux handicapés visuels ou auditifs qui acquièrent les supports d'enregistrement pour leur propre usage (la redevance est versée mais remboursée). Par ailleurs, les barèmes de rémunération sont déterminés en prenant en considération, pour les supports mixtes, le fait qu'ils soient en partie utilisés par des entreprises ou administrations dans le cadre de leur activité professionnelle. C'est la position défendue dans un communiqué de presse de plusieurs sociétés de gestion collective qui « constatent avec satisfaction la compatibilité de la réglementation française et des pratiques de la commission copie ». Les termes du débat entre les ayants-droit et les industriels étant posés, reste désormais à savoir quelle sera la portée jurisprudentielle en France de cette décision du 21 octobre 2010…