Précisions sur les critères du dépôt d’une marque sonore : « le Pschiit » n’est pas distinctif

La societe Ardagh Metal Beverage Holdings GmbH & Co. KG a sollicité l’enregistrement d’une marque au titre d’un signe sonore qui rappelle le son qui se produit à l’ouverture d’une canette de boisson, suivi d’un silence d’environ une seconde et d’un pétillement d’environ neuf secondes. Un fichier audio a été produit par la requérante lors du dépôt de la demande d’enregistrement.

L’EUIPO a informé la requérante que la marque demandée n’était pas susceptible de faire l’objet d’un enregistrement. Il a indiqué, en particulier, que cette marque, qui était constituée d’un son reproduisant l’ouverture d’une canette de boisson, suivi d’une pause puis d’un long pétillement, ne pourrait pas être perçue comme un indicateur de l’origine commerciale des produits.

Par décision du 24 juillet 2019 la deuxième chambre de recours de l’EUIPO a rejeté le recours de la requérante contre la décision de l’examinateur.

La requérante a donc saisi le Tribunal de l’Union européenne en opposant notamment que le son reproduit par la marque demandée est inhabituel pour les produits compris dans les classes 29, 30, 32 et 33 qui ne contiennent pas de gaz carbonique, de sorte que le caractère distinctif déjà existant de ladite marque serait renforcé. Il en irait de même pour les produits compris dans les classes 29, 30, 32 et 33 qui contiennent du gaz carbonique, les divers éléments sonores composant la marque demandée se distinguant du son produit lors de l’ouverture de canettes de boissons gazeuses habituelles sur le marché, de sorte que le public pertinent les percevrait comme une indication de l’origine commerciale desdits produits

Le Tribunal, suivant jugement du le 7 juillet 2021 va débouter la requérante comme suit.

Il va tout d’abord être rappelé que le signe sonore dont l’enregistrement est demandé, doit posséder une certaine prégnance permettant au consommateur visé de le percevoir et de le considérer en tant que marque et non pas en tant qu’élément de nature fonctionnelle ou en tant qu’indicateur sans caractéristique intrinsèque propre. Ledit consommateur doit donc considérer le signe sonore comme possédant une faculté d’identification, en ce sens qu’il sera identifiable en tant que marque.

Le Tribunal va ainsi rappeler que d’une partie de son émis lors de l’ouverture d’une canette sera considéré, eu égard au type de produits en cause, comme un élément purement technique et fonctionnel, l’ouverture d’une canette ou d’une bouteille étant intrinsèque à une solution technique déterminée dans le cadre de la manipulation de boissons aux fins de les consommer, indépendamment du fait que de tels produits contiennent du gaz carbonique ou non.

Or, dès lors qu’un élément est perçu par le public pertinent comme remplissant avant tout un rôle technique et fonctionnel, il ne sera pas perçu comme une indication de l’origine commerciale des produits concernés.

Enfin, et même si l’argument n’était pas de nature à annuler la décision attaquée, le Tribunal va infirmer l’argumentaire de l’EUIPO selon lequel, si le son ne retentit que lors de la consommation du produit en cause, donc après son acquisition, il ne peut aider le public pertinent à s’orienter dans son choix d’achat. Le Tribunal va en effet juger que si la plupart des produits sont silencieux en eux-mêmes, et ne produisent un son qu’au moment de leur consommation, le simple fait qu’un son ne puisse retentir que lors de la consommation d’un produit ne signifie pas que l’usage de sons pour signaler l’origine commerciale d’un produit sur un marché déterminé serait encore inhabituel.

Mathieu MARTIN