Procès des attentats de 2015 : Le plaidoyer en faveur de la liberté d’expression

«On n’a pas le choix. Renoncer à la libre critique des religions, renoncer aux caricatures de Mahomet, ce serait renoncer à notre histoire, à l’Encyclopédie, aux grandes lois de la République. Ce serait renoncer à l’indomptable liberté humaine pour vivre enchaîné.» Par ces mots critiques, offensifs et retentissants, Me Richard MALKA prononçait une plaidoirie en faveur de la liberté d’expression et de notre République.

Dernier Avocat des parties civiles à s’exprimer, le procès des attentats de 2015 permettait de rappeler les principes fondateurs de notre République, ébranlés et tourmentés par la haine. Tel que l’indiquait Me MALKA, ce procès est évidemment celui des victimes directes, mais il s’agit également d’un procès à plus grande ampleur, celui « des valeurs républicaines ébranlées ». Et pour cause, l’Histoire de France est rappelée à la Cour. Dans son discours laïc, Me MALKA salue la révolution des encyclopédistes autour de Diderot : « Grâce à eux, on a décidé de se débarrasser de Dieu pour appliquer la raison à toutes les activités humaines ». Un hommage à une France qui s’est battue pour les libertés individuelles et collectives. Une France révolutionnaire, permettant à Mirabeau d’ériger la liberté d’expression comme l’un des droits les plus précieux de l’homme.

Elle figure ainsi à l’article 11 de la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen en ces termes : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi ».

Cette liberté entend mettre fin à plusieurs siècles de censure, aux techniques utilisées par les pouvoirs politiques de l’Ancien Régime pour contraindre les opinions contestataires.

Entendue de manière universelle, elle permet finalement de rappeler les droits inhérents à l’Homme.

Composante de la liberté d’expression, la liberté de la presse a été adoptée au sein des libertés publiques dès le 29 juillet 1881. Elle est renforcée par la jurisprudence du Conseil constitutionnel qui retient de la liberté d’expression que « s’agissant d’une liberté fondamentale, d’autant plus précieuse que son exercice est l’une des garanties essentielles du respect des autres droits et libertés et de la souveraineté nationale, la loi ne peut en réglementer l’exercice qu’en vue de le rendre plus effectif ou de le concilier avec celui d’autres règles ou principes de valeur constitutionnelle » (Conseil Constitutionnel, 10-11 octobre 1984, Entreprises de presse). Ne s’agissant pas, de toute évidence, d’une liberté absolue, elle est aujourd’hui l’un des piliers de notre République.

Malheureusement, la société actuelle impose de rappeler ces principes, bafoués lors des attentats du 7 au 09 janvier 2015. Ceux-ci ont mis à mal le droit de s’exprimer librement en s’attaquant à Charlie Hebdo, célèbre journal apportant un regard satirique et laïc sur la société.

Les mots de Me MALKA permettent de rappeler que la liberté d’expression et la critique des religions font parties de notre pays. Il n’hésitera alors pas à crier à la Cour : « Ceux qui insultent Dieu ce ne sont pas les caricaturistes mais ceux qui tuent des innocents. »

Un plaidoyer en faveur de la liberté d’expression, de la liberté de la presse, de la laïcité, mais surtout le constat que Charlie Hebdo serait devenu invincible : « Vous en avez fait un symbole, une idée. Ils peuvent nous tuer mais ils ne peuvent pas tuer une idée ». Rappelant ainsi la puissance des droits et libertés fondamentales, la liberté d’expression restera et vivra.