Les contours de la vie privée du salarié

La décision du Conseil des prud'hommes de Boulogne-Billancourt du 19 nov. 2010, n° 10/00853 vient apporter de nouvelles précisions quant à la limite entre vie privée et vie professionnelle des salariés d’une entreprise.

En l’espèce, les salariés d’une entreprise avaient échangés des propos portant atteinte à l’image de leur employeur via le réseau social Facebook. Cette interface permet aux utilisateurs de créer une page personnel et de se connecter avec ses connaissances par le biais d’une fonction permettant à deux personnes de devenir « amis » après confirmation. Les messages échangés peuvent l’être par le biais d’une sorte de messagerie privée ou par le biais d’une publication sur le profil du destinataire. Chacun peut par ailleurs publier des courts commentaires sur sa propre page personnelle. Il existe plusieurs degrés de contact, et selon les paramètres par défaut de Facebook, non seulement les « amis » mais aussi les « amis » des « amis » peuvent avoir accès aux données publiées par chacun.

Il convient de rappeler par ailleurs que la Cour de cassation avait, le 18 mai 2007, réaffirmé le principe selon lequel le respect dû à la vie privée du salarié et à sa correspondance doit primer sur les considérations disciplinaires de l’employeur quand bien même la correspondance aurait provoqué un trouble dans l’entreprise et porté atteinte à son image de marque.

Or ici, il a été retenu par le Conseil des prud’hommes de Boulogne-Billancourt que les correspondances échangées entre les salariés ne relevaient pas de la correspondance privée, puisque ces derniers avaient publié leurs commentaires injurieux sur leur profil personnel, sans en avoir changé les paramètres par défaut de confidentialité, les laissant ainsi visible par un large nombre de personnes, y compris des personnes « extérieures à l’entreprise ». Le Conseil estime par ailleurs que les salariés ont abusé de leur liberté d’expression, se reposant sur l’argument technique de verrouillage des écrits. La sanction prise à leur encontre par leur employeur sur cette base est donc valable juridiquement.

Cet reste donc dans la mouvance de la jurisprudence des dernières années, qui ne cesse de rappeler à l’ordre les salariés ou étudiants utilisant à mauvais escient les plateformes qui sont mises à leur disposition sur internet (blogs, pages personnelles…) et appelle encore une fois à la plus grande vigilance quant aux propos touchant au domaine professionnel.