La CJUE veille à ce qu’il n’y ait pas de retour à des mesures équivalentes aux mesures de vérifications aux frontières au sein de l’espace Schengen.

Selon le droit allemand, toute entreprise de transport par autocar assurant un service régulier transfrontalier à l’intérieur de l’espace Schengen à destination de l’Allemagne doit contrôler le passeport et le titre de séjour des passagers avant le franchissement de la frontière allemande. Ce contrôle vise à prévenir le transport de ressortissants de pays tiers dépourvus de ces documents de voyage vers le territoire allemand.

Afin de faire respecter cette obligation de contrôle, les autorités policières peuvent adopter une décision d’interdiction de tels transports assortie d’une menace d’astreintes à l’encontre d’entreprises de transport dont il est constaté qu’elles ont acheminé sur le territoire allemand des ressortissants de pays tiers dépourvus desdits documents de voyage.

Touring Tours und Travel ainsi que Sociedad de Transportes sont des opérateurs de voyage par autocar établis, respectivement, en Allemagne et en Espagne, qui exploitent des lignes régulières à destination de l’Allemagne traversant les frontières germano-néerlandaise et germano-belge. Estimant que ces entreprises avaient transporté vers l’Allemagne un nombre important de ressortissants de pays tiers dépourvus des documents de voyage requis, le Bundespolizeipräsidium (direction de la police fédérale, Allemagne) a, en 2014, après un avertissement, adopté des décisions leur interdisant, sous peine d’astreinte, de transporter vers le territoire allemand les ressortissants de pays tiers dépourvus de passeport et des titres de séjour requis.

Les deux opérateurs de transport par autocar ont introduit des recours contre ces décisions d’interdiction devant les juridictions allemandes. Ayant des doutes quant à la compatibilité de l’obligation de contrôle litigieuse avec la suppression des contrôles aux frontières intérieures de l’espace Schengen, le Bundesverwaltungsgericht (Cour fédérale administrative fédérale, Allemagne) a interrogé la Cour de justice à ce sujet.

C’est ainsi que sur renvoi préjudiciel, la CJUE était saisie de la question de savoir si des mesures adoptées par un Etat membre visant à interdire le transport à destination de son territoire depuis un autre Etat membre méconnaissait le code dit frontières Schengen.

Par son arrêt du 13 décembre 2018 (affaires jointes C-412/17 et 474/17, Bundesrepublik Deutschland c/ Touring Tours und Travel GmbH & Sociedad de Transportes SA), la Cour constate que le code frontières Schengen 1 (dans sa version applicable en 2014) s’oppose à l’obligation de contrôle litigieuse à la charge des opérateurs de voyage par autocar vers l’Allemagne ainsi qu’à l’adoption de décisions interdisant, sous peine d’astreinte, aux opérateurs qui ont méconnu cette obligation d’effectuer tout nouveau transport dans les mêmes conditions.

Les contrôles en cause étant effectués au moment où les voyageurs montent dans l’autocar au début du voyage transfrontalier, ces contrôles constituent des vérifications à l’intérieur du territoire d’un État membre, qui sont interdits lorsqu’ils ont un effet équivalent à celui des vérifications aux frontières.

S’il est possible à l’Allemagne de prévoir des contrôles de police sur l’ensemble de son territoire, elle ne peut mettre en place ainsi qu’elle l’avait fait des mesures qui reviendraient à instaurer un contrôle aux frontières au sein même de l’espace Schengen. Selon la Cour, les contrôles en cause ont sont donc interdits.