Impossibilité, pour un avocat, de renoncer au droit à l’assistance d’un avocat.

CEDH, gr. ch., 4 avr. 2018, n° 56402/12, Correia de Matos c/ Portugal : JurisData n° 2018-005820 :

En l’espèce, le requérant, ressortissant portugais, avocat de formation, a été suspendu dans l'exercice de ses fonctions, en raison de l’exercice de la profession de commissaire aux comptes, jugée incompatible. Le requérant a mis un terme à ses activités de commissaire aux comptes, mais est demeuré suspendu du barreau en raison d’une sanction disciplinaire pour exercice non autorisé de la profession d’avocat. Il s’est plaint des décisions des juridictions internes lui ayant refusé l'autorisation de se défendre lui-même dans le cadre de la procédure pénale dirigée contre lui et lui ayant imposé d'être représenté par un avocat. Au-delà de ce cas spécifique, c'est l'exigence de représentation par un avocat dans les procédures pénales qui est en cause, exigence prévue par la législation et déclarée conforme à la Constitution, y compris lorsque le requérant est lui-même avocat. Bien que l'article 6, § 3, c), de la CEDH, reconnaisse à tout accusé le droit « de se défendre lui-même ou d'avoir l'assistance d'un défenseur de son choix », la Cour considère qu'il ne garantit pas nécessairement à l'accusé le droit de décider de la manière dont sa défense doit être assurée, le choix entre les deux options mentionnées à l'article 6, § 3, c), relevant de la marge d'appréciation des États (§ 122 et 123). Elle avait d'ailleurs déjà jugé dans une décision concernant le même requérant que les juridictions nationales sont en droit d'estimer que les intérêts de la justice commandent la désignation obligatoire d'un avocat (CEDH, déc., n° 48188/99, 15 nov. 2001). Examinant les raisons justifiant la restriction au droit de se défendre soi-même appliquée en l'espèce, la CEDH observe que la règle portugaise relative à l’obligation d‘être représenté par un avocat dans une procédure pénale vise à assurer une bonne administration de la justice et un procès équitable respectant le droit de l’accusé à l’égalité des armes. Eu égard à l’ensemble du contexte procédural dans lequel cette obligation de représentation a été imposée et à la marge d’appréciation laissée aux Etats membres quant au choix des moyens à mettre en œuvre pour garantir la défense d’un accusé, la Cour estime que les raisons fournies à l’appui de l’obligation d’être assisté, en général et en l’espèce, étaient à la fois pertinentes et suffisantes. Elle rejette donc le grief tiré de la violation de l’article 6§3 c) de la Convention.