Dans le cadre d’une procédure de saisie conservatoire des meubles garnissant une maison d’habitation louée : la responsabilité de l'huissier peut être engagée du fait de la reprise illicite d'un logement

Dans son arrêt du 6 juillet 2017, la Cour de cassation a jugé que la seule constatation d’une reprise illicite d’un logement ouvre droit à réparation.

(Cass. 3e civ. 6-7-2017 n° 16-15.752, SCI Roy-Lemoine-Galy). Un bailleur fait procéder par un huissier à la saisie conservatoire des meubles de son locataire en l’absence de celui-ci. A l’occasion de cette saisie, l’huissier constate que le locataire a quitté les lieux en emportant les meubles. Il a été par ailleurs avisé que le locataire avait déménagé. Quelques jours plus tard, il dresse un procès-verbal de reprise des lieux et fait changer les serrures du logement, sans qu’il y ait eu au préalable une mise en demeure et une décision de justice constatant la résiliation du bail. Le locataire décide alors d’assigner l’huissier en réparation de son préjudice pour reprise illicite du logement. La cour d’appel de Douai rejette la demande du locataire. Selon elle, ce dernier n’administre pas la preuve que la reprise du logement dont il s’était retiré volontairement pour intégrer une autre habitation, dans des conditions répréhensibles au regard de ses obligations de gardien des meubles saisis entre ses mains à titre conservatoire, même en l’absence de mise en demeure et d’une décision de justice constatant la résiliation du bail lui a causé un dommage matériel ou moral dont l’huissier devrait l’indemniser. La Cour de cassation censure l’arrêt. En définitive, dresser un procès-verbal de reprise des lieux et faire changer les serrures d’un logement en l’absence de mise en demeure et de décision de justice constatant la résiliation du bail constitue une reprise illicite du logement et engage la responsabilité de l’huissier. Dans cette affaire, il est reproché à l’huissier de ne pas avoir respecté la procédure de résiliation d’un bail d’habitation en cas d’abandon du logement par le locataire. Lorsque des éléments laissent supposer au bailleur que le logement est abandonné il doit adresser à son locataire une mise en demeure de justifier qu'il occupe bien le logement. La mise en demeure doit être faite par acte d'huissier. Sans réponse de la part du locataire dans le délai d'1 mois, l'huissier de justice peut constater l'état d'abandon du logement. Le juge peut ensuite prononcer la résiliation du bail. L’huissier a directement établi le procès-verbal de reprise des lieux et fait changer les serrures du logement sans que le juge ait prononcé la résiliation du bail. Il a donc commis une faute en ne respectant pas la procédure légale. Sa responsabilité pouvait donc être engagée pour reprise illicite et entraîner par voie de conséquence, selon la Cour de cassation, une indemnisation pour le préjudice causé au locataire.