Les actions de groupes

La loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation a introduit dans le droit français la procédure d’action de groupe. Parce que son origine est américaine, certains parlent de l’action de groupe comme une « classe action à la française ». Cette procédure permet à des consommateurs s’estimant victimes des faits d’un même professionnel de se regrouper pour obtenir réparation des préjudices qui en résultent.

Le nouvel article L. 423-1 du Code de la consommation dispose ainsi qu’une association de défense des consommateurs représentative au niveau national et agréée peut agir devant une juridiction civile afin d'obtenir la réparation des préjudices individuels subis par des consommateurs placés dans une situation similaire ou identique et ayant pour cause commune un manquement d'un ou des mêmes professionnels à leurs obligations légales ou contractuelles, soit à l’occasion de la vente de biens ou de fourniture de services ou de certaines pratiques anticoncurrentielles.

Le deuxième alinéa de cet article précise que « l’action de groupe ne peut porter que sur la réparation des préjudices patrimoniaux résultant des dommages matériels subis par les consommateurs. Les domaines de la santé et de l'environnement restent exclus du champ d'application du texte. » On entend par « consommateurs » des personnes physiques agissant à des fins autres que professionnelles ; les personnes morales sont donc exclues de l’action de groupe.

Le monopole de la coordination de l’action est donc attribué aux associations agréées, au détriment des avocats par lesquels il restera obligatoire d’être représenté, comme le prévoit le Code de l’organisation judiciaire (article L. 211-15) en ce qui concerne les actions engagées devant le Tribunal de Grande Instance (TGI). Pour l’heure, les associations susceptibles d’intenter une action de groupe sont au nombre de 17.

Le TGI va, en premier lieu et au vu des cas individuels, se prononcer sur la recevabilité de l’action et statuer sur la responsabilité du professionnel. L’absence de procédure distincte de recevabilité permet à l’action de gagner en rapidité. Le TGI détermine aussi les préjudices susceptibles d'être réparés pour chaque consommateur ou chacune des catégories de consommateurs constituant le groupe qu'il a défini, ainsi que leur montant ou tous les éléments permettant l'évaluation de ces préjudices (Article L. 423-3, C. conso.).

Une fois la décision sur la responsabilité prise, et si elle n’est plus susceptible de recours, des mesures de publicité sont ordonnées pour informer les consommateurs susceptibles d’appartenir au groupe (Article L. 423-4, C. conso.). A partir de ce moment et avant l’écoulement d’un certain délai, les consommateurs pourront rejoindre le groupe afin d’être parties à la procédure (Article L. 423-5, C. conso.). Mais le professionnel aura la possibilité de contester la présence de certains consommateurs dans le groupe, ce sur quoi statera le TGI (Article L. 432-12, C. conso.).

Le jugement statuant sur la responsabilité du professionnel fixe les conditions, limites et délais dans lesquels ce dernier indemnise les préjudices individuels subis par chaque consommateur (Article L. 423-11, C. conso.). S’il ne procède pas aux indemnisations, des mesures d’exécution forcées pourront être prises.

La portée définitive des conséquences financières d’une telle procédure sera difficile à déterminer pour les entreprises défenderesses dans la mesure où les consommateurs ne se joignent à l’action que tardivement, entrainant des difficultés comptables liées aux provisions. Il sera possible de transiger en négociant un accord avec l’association qui devra être homologué par le TGI, faire l’objet d’une publicité pour que les consommateurs décident ou non d’y adhérer (Article L.423-16, C. conso.).

Des actions de groupe multiples risquent d’être déclenchées simultanément. En effet, il est prévu que l’action n’est pas recevable si elle se fonde sur les mêmes faits et manquements et la réparation des mêmes préjudices que ceux ayant déjà fait l’objet d’un jugement sur la responsabilité du professionnel. Cependant un laps de temps important peut s’écouler entre le moment de l’introduction d’une action de groupe et le rendu de la décision du tribunal.

Depuis le 1er octobre 2014, il est possible de mettre en œuvre cette nouvelle procédure. C’est ainsi que la société FONCIA est la première société à être attaquée dans le cadre d’une action de groupe, UFC Que Choisir ayant déclaré avoir déclenché une procédure devant le TGI de Nanterre par cette voie et pour réclamer l'indemnisation de locataires auxquels elle facture chaque mois des frais d'expédition de quittance (2,30 € par mois et par locataire). Le groupe FONCIA serait ainsi à l’origine d’un bénéfice frauduleux de plus de 40 millions d'euros sur les 5 dernières années selon l’association de défense des consommateurs.