Particuliers ou entreprises, quelle fiscalité pour l’achat d’œuvres d’art ?

L’art se démocratise ! L’art se défiscalise !

En effet, comme a le relatait déjà la responsable du conseil en art de la BNP Paribas Wealth Management en 2020 « le monde de l’art s’est profondément démocratisé avec un intérêt accru pour l’art en général ». Longtemps réservé à un réseau de fins connaisseurs, amateurs d’art ou investisseurs aisés, l’art devient aujourd’hui plus accessible et touche une clientèle beaucoup plus jeune et diversifié.

L’ère du numérique est assurément l’un des vecteurs majoritaire de cette nouvelle forme de partage et de diffusion de l’information artistique à ce public plus large. Musées nationaux disposant d’une identité virtuelle, accroissement des foires d’Art dans le monde, force est de constater que cette médiatisation des œuvres d’Art participe aujourd’hui au développement du marché de l’art.

Aussi, quels sont les avantages fiscaux pour les personnes physiques ou morales soucieuses de faire l’acquisition d’une œuvre d’Art ?

En premier lieu, les œuvres d'art ouvrant droit à la défiscalisation sont prévues et détaillées à l'article 98A du Code général des Impôts. Ainsi, l’on retrouve les tableaux, collages, peintures et dessins exécutés à la main par l’artiste, les gravures, estampes, lithographies originales tirées en un nombre limité, les textiles et tapisseries murales faites à la main sur la base de cartons originaux fournis par l’artistes, les photographies prises par l’artiste ou encore objets d’antiquité ayant plus de cent ans d’âge etc.

Suivant l’acquisition d’une œuvre artistique, certaines règles diffèrent toutefois si l’investisseur est un particulier ou une entreprise.

A. Les règles applicables aux particuliers

Si le particulier paie l’impôt sur la fortune immobilière (IFI), l’acquisition d’œuvres d’art lui est bénéfique dès lors :

  • Qu’elles sont totalement exonérées d’impôts et n’ont pas lieu d’être mentionnée sur la déclaration d’IFI ;
  • Que lors de l’achat d’une œuvre d’art, le taux de TVA est de 20% s’applique. Toutefois, le taux est ramené à 5,5% aux acquisitions réalisées en France ou directement auprès de l’artiste ou de ses ayants-droit ;
  • Qu’aucune TVA n’est applicable si l’acquisition est réalisée auprès d’un vendeur-non-assujetti à la TVA ;
  • Que seule la cession d’une œuvre d’art dont le prix de vente est supérieur à 5.000€ est soumise à une imposition. Aussi en cas de revente de l’œuvre, le particulier a le choix entre :

o Une imposition forfaitaire sur le prix de cession à un taux de 6,5% (6% + 0,5% de contribution pour le remboursement de la dette sociale), ce taux est en revanche de 11,5% pour les métaux précieux ; o L’imposition des plus-values mobilières, l’imposition se fait alors sur la différence entre le prix d’achat et le prix de vente. (l’imposition d’une plus-value est de 19% auquel s’ajoute 14,2% de prélèvement sociaux soit 36,2%. Un abattement de 5% par année de détention au-delà de la deuxième année se met en place. Ainsi, si l’œuvre d’art est détenue pendant 22 ans, le particulier bénéficie d’une exonération totale de l’impôt sur la plus-value).

  • Que si le particulier fait don d’une œuvre d’art à un musée ou un organisme d’intérêt général, ce don peut réduire considérablement ses impôts. En effet, 66% de la valeur de l’œuvre peut venir en déduction de l’IR dans la limite de 20% de ces revenus imposables.
  • Qu’également, les œuvres d’art peuvent permettre de régler les droits de successions via la procédure de « dation de paiement », ce qui permet de payer l’impôt avec une œuvre d’art (dispositif crée en 1968 par la loi MALRAUX).
  • Qu’enfin, l’exposition de l’œuvre n'est absolument pas obligatoire. L'œuvre peut être destinée à la sphère privée.

B. Les règles applicables aux entreprises

Une entreprise qui investit dans l’art peut également bénéficier d’une réduction fiscale sous certaines conditions. En effet, seules les sociétés suivantes sont susceptibles de bénéficier du dispositif de défiscalisation d’une œuvre d’art :

  • Les sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés (IS) ;
  • Les entreprises individuelles soumises à l’impôt sur le revenu (IR) dans la catégorie des Bénéfices industriels et commerciaux (BIC)

Elles doivent ainsi détenir une facture d’achat de l’œuvre, laquelle servira de preuve fiscale et devant contenir certaines informations à l’instar de l’origine de l’œuvre ou encore le montant et la date d’acquisition. Elles doivent en sus :

  • Acquérir une œuvre originale d’un artiste vivant : l’entreprise doit ainsi pouvoir justifier de l’existence de l’artiste à la date d’acquisition de l’œuvre,
  • Exposer l’œuvre d’art : l’entreprise doit exposer l’œuvre d’art durant 5 ans de manière permanente, l’exposition peut se faire dans les locaux de l’entreprise dès lors qu’ils sont accessibles au public ou aux salariés, mais encore dans un musée, dans des manifestations organisée par l’entreprise. L’œuvre ne doit ainsi pas être exposée dans un bureau personnel ou un lieu réservé aux clients de l’entreprise ;
  • Inscrire le prix d’acquisition déductible à un compte de réserve spécial au passif du bilan de l’entreprise : Une condition qui exclut du dispositif les entreprises soumises à l’IR dans la catégorie des Bénéfices non commerciaux (BNC), soit « les professions libérales ».

Les professions libérales peuvent toutefois bénéficier d’avantages fiscaux lors d’un versement d’un don à un organisme afin de soutenir une œuvre d’intérêt général suivant la Loi n°2003-709 du 1er août 2003 relative au mécénat, aux associations et aux donations.

Ainsi, les avantages de la défiscalisation pour les entreprises sont les suivantes :

  • Elles bénéficient d’une déduction fiscale plafonnée et peuvent choisir entre une réduction à hauteur de 0,50% du chiffre d’affaires hors taxe OU une réduction de 20.000 €
  • Elles peuvent ainsi déduire le montant d’achat de l’œuvre d’art durant une période de 5 années à fraction égale du chiffre d’affaire hors taxe ou des 20.000 €. (si la fraction du prix des œuvres ne peut pas être totalement déduit sur une année, l’excédent est perdu et ne peut pas être reporté).

Ainsi, comme le disait Auguste Rodin, célèbre sculpteur du XIXème siècle « l’art, c’est la plus sublime mission de l’homme, puisque c’est l’exercice de la pensée qui cherche à comprendre le monde et le faire comprendre ». Si l’art reste avant tout un plaisir des yeux, il peut également être un plaisir pour ses impôts !

Alicia COLLOT