Bail commercial : Immatriculation au RCS et droit au renouvellement du bail commercial

L’article L. 145-1 du Code de commerce conditionne l’application du statut des baux commerciaux à l’immatriculation au RCS du preneur. Faute de se conformer à cette obligation, ce dernier est déchu du statut des baux commerciaux et perd le droit au renouvellement du bail et au paiement d’une indemnité d’éviction.

Autrement dit, l’immatriculation au RCS (Registre du Commerce et des Sociétés) est une obligation légale à laquelle sont assujettis les commerçants, sociétés et groupements d’intérêts économiques dont le siège social se trouve en France.

Cette immatriculation permet notamment aux commerçants et sociétés de bénéficier du statut protecteur des baux commerciaux et conditionne de façon contraignante leur droit au renouvellement du bail commercial.

Or, il importe de rappeler les exigences posées par la Cour de Cassation, dans un arrêt remarqué du 22 septembre 2016, quant à l’étendue et au périmètre de cette obligation. Le droit au renouvellement du bail commercial est conditionné à l’immatriculation au RCS de l’établissement exploité.

En matière de baux commerciaux, l’immatriculation au RCS évoquée est celle du local dans lequel est exploitée un fonds de commerce et non de l’immatriculation liée à la personne du commerçant. En effet, un commerçant peut être immatriculé sans que le local qui fait l’objet de son bail ne le soit.

L’article L145-1 du Code de Commerce conditionne le bénéfice du statut des baux commerciaux à l’immatriculation au RCS du fonds de commerce exploité. Le défaut d’immatriculation au RCS exclut tout droit au renouvellement du bail commercial En vertu de l’article L 145-9 du Code de commerce, le droit au renouvellement des baux commerciaux protège le preneur d’un bail commercial contre un éventuel refus de renouvellement par le bailleur. En effet, le bailleur doit à la fin du bail commercial, à défaut de proposer le renouvellement de ce bail ou de l’accepter à la demande du preneur, payer une indemnité d’éviction représentant la valeur du fonds sauf s’il justifie d’un motif légitime, ce motif légitime étant encadré et apprécié sévèrement par les juges. Encore faut-il que l’établissement visé par le renouvellement soit immatriculé dans les conditions rappelées plus avant.

A défaut, le bailleur, est en droit, sans avoir à justifier de motif supplémentaire, de refuser tout renouvellement du bail sans paiement de l’indemnité d’éviction. La sanction est sévère, rigoureuse et irréparable. Le preneur d’un bail commercial non immatriculé au RCS au jour de la délivrance de congé, ne peut pas se prévaloir du droit au renouvellement. La condition d’immatriculation doit donc être remplie au moment du congé. Le défaut d’immatriculation, prive non seulement du droit au renouvellement mais également de l’indemnité d’éviction. Il apparait donc clairement que les conséquences économiques d’un refus de renouvellement d’un bail commercial peuvent être graves et mettre l’activité commerciale concernée en danger.

Le respect de cette obligation légale est d’une importance capitale d’autant plus que les Tribunaux font une application stricte des textes. C’est ainsi que dans une décision novatrice et très remarquée du 22 septembre 2016, la Cour a encore endurci ce principe en y ajoutant une nouvelle contrainte relative à l’activité effectivement exploitée. L’immatriculation au RCS doit comporter l’activité réellement exercée Par un arrêt du 22 septembre 2016 (n° 15-18.456), la troisième chambre civile de la Cour de cassation précise la portée cette obligation et juge que celle-ci n’est pas satisfaite lorsque le preneur exerce dans les lieux une activité différente de celle pour laquelle il est immatriculé. Si la solution n’est pas nouvelle (v. Cass. 3ème civ., 18 janvier 2011, n° 09-71.910), les faits de l’espèce permettent d’illustrer le principe posé par la Cour de cassation.

Il ressort de l’arrêt d’appel (CA Paris, 25 mars 2015, n° 13/08057) que le locataire était immatriculé au RCS, depuis plus de trente ans, pour les activités de « vente d’objets d’art, bois sculptés, miniatures et ivoires, d’importation et d’exportation d’objets de luxe ». Néanmoins, comme l’ont relevé les juges du fond, il se livrait essentiellement au commerce « d’objets touristiques, lesquels ne constituent pas des objets de luxe » et n’avait pas déclaré cette modification d’activité au RCS. Pour autant, la cour de cassation a considéré que ce manquement n’était pas suffisamment grave pour justifier le refus de versement d’une indemnité d’éviction. Les juges du fond ont semblé considérer qu’il existait une certaine connexité entre la vente d’objets touristiques et la vente d’objets de luxe et, surtout, ont relevé que la condition d’immatriculation était satisfaite lors de la demande de renouvellement. Saisie d’un pourvoi, la troisième chambre civile censura cette décision et estima que le preneur était immatriculé au RCS pour une activité qui n’était pas celle réellement exercée dans les lieux loués.

En définitive, après avoir rappelé d’une part le principe selon lequel « le défaut d’immatriculation prive le preneur de son droit au renouvellement et de l’indemnité d’éviction », et ce sans nul besoin d’une mise en demeure préalable, la Cour de Cassation ajoute en amont mais sans moins d’importance, que l’activité mentionnée dans l’extrait du k bis doit être l’activité effectivement exercée dans les lieux d’exploitation du fonds. Si l’activité effectivement exploitée n’est pas l’activité indiquée dans l’extrait de Kbis, l’immatriculation ne vaut plus rien à elle seule, et le locataire ne bénéficie pas du statut des baux commerciaux et des droits afférents. Non seulement, le fonds de commerce exploité doit être immatriculé mais en plus, il doit l’être pour toutes les activités effectivement exploitées.