L’obligation de mise en garde de la Banque ne porte que sur les risques de l’opération financée

Le devoir de mise en garde peut être défini comme étant le devoir d’alerter l’emprunteur des risques du crédit eu égard à ses capacités financières. Ce devoir implique pour la banque de vérifier le niveau de connaissance de son client avec le produit proposé ainsi que ses moyens financiers. Et encore, la Cour de cassation a récemment précisé que le devoir de mise en garde de la banque prêteuse porte sur le risque d'endettement résultant de l'octroi du prêt et non sur les risques de l'opération financée par le prêt. Une société civile immobilière (SCI) souscrit auprès d’une banque quatre prêts à un taux d'intérêt nominal révisable, initialement fixé à 4,80 %. Considérant que, si le projet ainsi financé est viable avec un taux fixe à 4,80 %, il ne l’est plus si le taux atteint 6 %, la SCI prétend que la banque a manqué à son devoir de mise en garde quant au caractère variable du taux d'intérêt et au risque d’insolvabilité en résultant. Elle demande donc à la banque le paiement de dommages-intérêts. La Cour de cassation rejette la demande et a retenu que « l'obligation de mise en garde à laquelle peut être tenu un établissement de crédit à l'égard d'un emprunteur non averti avant de lui consentir un prêt ne porte que sur l'inadaptation de celui-ci aux capacités financières de l'emprunteur et sur le risque de l'endettement qui résulte de son octroi, et non sur les risques de l'opération financée ». Or, en l’espèce, la SCI ne prétendait pas que les conditions des contrats de prêts initiaux l’avaient exposée à un risque d'insolvabilité, mais uniquement que l'opération financée n'était pas viable ; en outre, les incidents de paiement survenus étaient liés au différend avec la banque sur le montant des échéances. Cette décision vient confirmer et renforcer l’état actuel de la jurisprudence. La banque est tenue à un devoir de mise en garde de l’emprunteur sur le risque d’endettement lié à l’octroi du prêt mais pas sur l’opportunité ou les risques de l'opération financée par le prêt (Cass. com. 23-9-2014 n° 13-22.475 ; Cass. com. 1-3-2016 n° 14-22.582). Ainsi, la mise en garde de la banque envers l’emprunteur s’applique s’il y a un risque d’endettement excessif, mais ne porte pas sur les risques de l'opération financée par le prêt.

*Cass. com. 20-4-2017 n° 15-16.316 F-D, SCI BFC c/ Crédit immobilier de France développement