Le congé du bail commercial par lettre recommandé avec accusé de réception : une source de complexité accrue

Le décret n° 2016-296 du 11 mars 2016 relatif à la simplification de formalités en matière de droit commercial a innové en permettant la délivrance d’un congé de bail commercial par lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR).

Avant la réforme instaurée par la loi Pinel du 18 juin 2014, seul l’acte d’huissier permettait de mettre fin au bail, les juges qualifiant cette formalité d’ordre public. Etant rappelé qu’à défaut de congé valable, le bail se poursuit jusqu’à ce que les parties décident d’y mettre fin d’un commun accord ou jusqu’à sa résiliation pour violation des obligations contractuelles incombant à l’une des parties, ou encore jusqu’à la signification d’un nouveau congé dans les formes exigées par le statut des baux commerciaux.

Par cette nouvelle faculté, le législateur a souhaité simplifier la gestion du bail commercial et en réduire les coûts. En réalité, il s’agit d’un faux cadeau fait aux bailleurs et aux locataires. Il donne la faculté aux bailleurs et aux locataires d'un bail commercial de recourir à la lettre recommandée avec demande d'avis de réception pour la notification du congé, pour le renouvellement du bail et pour sa déspécialisation.

Mais l'article R. 145-1-1 du Code de commerce, qui précisait que lorsque le congé prévu à l'article L. 145-9 est donné par lettre recommandée avec accusé de réception, la date du congé est celle de la première présentation de la première lettre, est abrogé.

Il est créé une section 6 intitulée : « Dispositions relatives au recours à la lettre recommandée avec demande d'avis de réception » et un article R. 145-8 au Code de commerce.

Lorsqu'une partie, bailleur ou locataire, a recours à la lettre recommandée avec demande d'avis de réception, la date de notification à l'égard de celui qui y procède est celle de l'expédition de la lettre et, à l'égard de celui à qui elle est faite, la date de première présentation de la lettre. Lorsque la lettre n'a pas pu être présentée à son destinataire, la démarche doit être renouvelée par acte extrajudiciaire.

Autrement dit, la faculté de délivrer congé par LRAR qui se veut plus simple et plus économique que l’acte d’huissier ne soit en définitif dotée que d’une efficacité très incertaine quant au moment de la notification par lettre recommandée avec accusé de réception.

Il n’est donc pas exclu que l’objectif, non seulement soit manqué mais que la sécurité juridique ait à en pâtir.

Pour éviter aux parties de se laisser abuser par l’apparente facilité procurée par la lettre recommandée et compte tenu de l'importance de la validité d'un congé, il est vivement conseillé aux bailleurs et locataires de baux commerciaux de recourir systématiquement à l’acte extrajudiciaire, seul garant de l’efficacité du congé.