L’indemnisation de l’employeur en cas de retard du vol de son salarié

A propos de l’arrêt de la CJUE du 17 février 2016 n° C 429/14

La convention de Montréal pour l'unification de certaines règles relatives au transport aérien international, faite à Montréal le 28 mai 1999 pose le principe selon lequel les passagers victimes d’un retard peuvent solliciter une indemnisation auprès du transporteur.

A cet effet, l’article 19 de la convention prévoit que « Le transporteur est responsable du dommage résultant d'un retard dans le transport aérien de passagers, de bagages ou de marchandises ». Le transporteur doit dans certaines conditions indemniser les voyageurs à la somme maximale de 4150 droits de tirages spéciaux. Dans un arrêt du 17 février dernier, la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) a appliqué de manière extensive ce principe d’indemnisation.

En l’espèce, des agents des services d’enquête ont effectué plusieurs vols aux fins d’atteindre leur destination et ce, par le biais notamment de correspondances. Toutefois, l’une de leur correspondance étant en retard, ils n’ont pu prendre le second vol et ont accusé un retard de plus de quatorze heures. Dans ces conditions, la Cour relève que « le retard de plus de quatorze heures avec lequel les intéressés sont arrivés à leur destination finale ayant entraîné la prolongation de leur mission professionnelle, le service des enquêtes leur a payé, conformément à la réglementation lituanienne, des indemnités journalières et des cotisations sociales supplémentaires, pour un montant total de 1 168,35 litas lituaniens (LTL) (environ 338 euros). Ce service a ultérieurement demandé à être indemnisé à hauteur de ce montant par Air Baltic, qui a refusé de donner une suite favorable à cette demande. » La question se posait donc de savoir si la Convention de Montréal avait vocation à s’appliquer à l’employeur dont les salariés avaient subi un retard dans le cadre de leur déplacement.

La Cour va reprendre les articles 19, 22 et 29 de la convention pour considérer dans un premier temps que la Convention ne précise nullement quelle est la personne qui doit avoir subi un dommage du fait d’un retard dans le transport aérien aux fins d’obtenir une indemnisation.

En effet, seul le dommage est visé mais nullement la personne concernée. Dès lors, la Cour en conclut que, compte tenu de l’absence d’exclusion par la Convention d’une indemnisation à l’égard d’un employeur, il convient d’en conclure que la Convention « est susceptible d’être interprété en ce sens qu’il s’applique non seulement au dommage qui a été causé à un passager, mais également à celui qu’a subi un tel employeur. »

Ensuite, dans un deuxième temps, la Cour va relever que la convention ne définit pas les personnes « qui recourent aux services d’un transporteur aérien international pour faire transporter des bagages, des marchandises ou des passagers donnés et qui sont susceptibles de subir, à ce titre, un dommage ».

Par conséquent, elle en déduit que la convention est applicable aux passagers pour les dommages subis par les passagers mais aussi à son employeur lorsque celui-ci a conclu un contrat de transport international visant à faire transporter ses employés. Ainsi, elle considère que l’employeur a droit de solliciter une indemnisation égale à la limite de 4150 droits de tirages spéciaux qui doit être multipliée par le nombre d’employés concernés par ce retard.

Si cette décision permet de prendre en compte le dommage subi par l’employeur dans ces hypothèses, n’oublions pas que ce dernier devra être en mesure de prouver son dommage en justifiant notamment de toutes les sommes versées à son ou ses salariés suite au retard constaté.