Procédure d’indemnisation : les effets de la substitution de l’ONIAM sur la suspension du délai de prescription

Cass. 1ère civ, 16 mars 2022, n°20-15.172

Par un arrêt du 16 mars 2022, la Cour de cassation vient apporter d’importantes précisions sur les délais de prescriptions et les suspensions de ce délai, dans le cadre précis de la procédure menée devant la Commission de Conciliation et d’Indemnisation.

Dans le cas étudié, il s’agit d’une patiente présentant une infection sur la hanche, après une opération au sein d’une clinique privée le 07 janvier 2002. Victime d’un accident médical, d’une affection iatrogène ou d’une infection nosocomiale, la patiente a valablement saisi la CCI d’une demande d’indemnisation. Aux termes de l’article L1142-7 du Code de la santé publique : « La saisine de la commission suspend les délais de prescription et de recours contentieux jusqu'au terme de la procédure prévue par le présent chapitre. » [i.e la procédure de règlement amiable]. Pour rappel, le délai de prescription de toute action indemnitaire suite à un dommage corporel se prescrit par dix ans à compter de la consolidation de l’état de santé. En l’espèce, l’état de santé de la victime a été considéré comme consolidé au 22 mars 2004.

Après avoir estimé, que l’infection était effectivement nosocomiale, les Experts ont toutefois retenus que cette infection était entièrement imputable à la faute du chirurgien.

En cas de faute, il appartient à l’assureur du chirurgien fautif de formuler une offre d’indemnisation à la victime. Aux termes de l’article L1142-14 du Code de la santé publique, l'assureur qui garantit la responsabilité civile ou administrative de la personne considérée comme responsable par la commission adresse à la victime ou à ses ayants droit, dans un délai de quatre mois suivant la réception de l'avis, une offre d'indemnisation visant à la réparation intégrale des préjudices subis dans la limite des plafonds de garantie des contrats d'assurance.

Néanmoins, et dans un soucis de protection des victimes, il est prévu par le Code de la santé publique, en son article L1142-15, qu’en cas de silence ou de refus explicite de la part de l'assureur de faire une offre, ou lorsque le responsable des dommages n'est pas assuré ou la couverture d'assurance prévue à l'article L. 1142-2 est épuisée ou expirée, l'Office National d’Indemnisation des Accidents Médicaux (ONIAM) se substitue à l’assureur. Il propose ainsi une offre à la victime en lieu et place de l’assureur, et bénéficie d’une action subrogatoire ensuite.

Tel a été le cas en l’espèce. L’ONIAM s’est substitué à l’assureur, a adressé une offre à la victime, qui l’a accepté et a été indemnisée. Par la suite l’Office a exercé son recours contre l’assurance du chirurgien fautif.

En première instance, ce dernier lui a opposé la prescription de l’action, indiquant que la suspension du délai de prescription avait pris fin en l’absence d’offre de l’assureur à la victime, lors de l’expiration du délai de quatre mois suite à la notification de l’avis CCI. Aussi, les délais de recours pour l’ONIAM étaient épuisés.

La 1ère chambre civile de la Cour de cassation va censurer l’appel sous le visa des articles L1142-7 , L1142-14, L1142-15 et L1142-28 du Code de la santé publique, rappelant que « dans le cas où l’ONIAM s’est substitué à l’assureur et où la victime a accepté son offre d’indemnisation, la procédure de règlement amiable a atteint son terme, de sorte que le délai de prescription suspendu depuis la saisine de la CCI, recommence à courir à compter du jour de cette acceptation. »

A la lecture de cette décision, il est donc important de connaître la date de décision d’acceptation de l’offre faite par l’ONIAM, afin de calculer efficacement la computation des délais.

Une nouvelle fois, la position de la Cour de cassation est favorable à l’indemnisation des victimes, en ce qu’elle étend la période de règlement amiable du dossier lors de la substitution de l’ONIAM et ce afin de palier à l’absence d’assurance ou le défaut d’indemnisation.

Pauline FONLUPT